Le 19 octobre 2024, le Collectif pour la sauvegarde du pays breton (EPE est membre de ce collectif), l’association Les Treize vents et le Fédération Environnement Durable appelaient à manifester contre « l’éolien à outrance ». La veille le gouvernement présentait des projets de zones de développement de l’éolien en mer. La date de la manifestation ne pouvait être mieux placée et 150 personnes ont défilé contre cette accélération du développement de l’éolien en mer mais aussi terrestre…
Qu’en est-il justement de ce développement outrancier ?
En mer…
Le nouveau mur de l’Atlantique sera celui des éoliennes, de Dunkerque à Biarritz : Dieppe, Courseulles sur mer, Saint Brieuc, Saint Nazaire, Noirmoutier… Des projets supplémentaires sur la côte d’opale, en Bretagne (agrandissement du parc de Saint Brieuc, au nord-ouest et au sud de la Bretagne) mais aussi au bord de l’Atlantique dans le Golfe de Gascogne… La Méditerranée n’est pas épargnée non plus : deux parcs, au large de Fos-sur-Mer et de Port-la-Nouvelle sont déjà validés et seraient in fine multipliés par cinq.
Sur terre…
« La Bretagne n’est pas un moulin à vent » entonnaient les représentants des différents collectifs lors de la manifestation. En France, une distance minimale de 500 mètres est obligatoire entre une éolienne et une habitation, alors qu’elle est de 700 mètres en Allemagne, 1000 mètres en Hongrie, Finlande ou Suède et 1250 mètres en Pologne.
Les agriculteurs sont en première ligne et souvent victimes de désinformation. Des loyers attractifs leur sont proposés, mais personne ne leur parle des surprises qu’ils risquent d’avoir lorsque l’exploitation sera terminée (au bout de 20 ans). Le montant forfaitaire pour le démantèlement, fixé par arrêté ministériel est de 50 000 € par éolienne. Monsieur Jean Pierre Sueur, sénateur, lors d’une question écrite posée au Ministère de la transition écologique le 23 janvier 2020, expliquait que le démantèlement pouvait coûter jusqu’à 120 000 €, et que « certains exploitants font faillite et ne peuvent plus financer l’ensemble du démantèlement… Le montant exigé s’avérant supérieur au montant provisionné ». En cas de problème, ce sont les propriétaires terriens, et non les promoteurs qui devront payer les frais inhérents au démantèlement (éoliennes et socles en béton). La cour d’Appel de Nîmes, le 22 mars 2023, a rendu un jugement éclairant : le promoteur ne pouvait supporter le coût du démontage de ses éoliennes (qui de plus fonctionnaient sans permis) et il avançait un coût de 171 000 € par machine ! * Le Particulier parle même de 400 000 €. **
On risque donc de voir, comme cela se passe déjà aux Etats-Unis, des friches industrielles d’éoliennes abandonnées.
Et pourquoi pas une éolienne chez vous ?
Le Particulier en mars 2023 nous mettait en garde : attention « aux démarches de rémunération alléchante » de certains promoteurs. Pas besoin d’être au milieu de la Beauce ! Si votre terrain a une superficie de 3000 m² et est situé à plus de 500 m de d’une habitation, vous êtes le candidat idéal ! En effet la Préfecture ne donne pas d’autorisation pour une seule éolienne, mais pour plusieurs !!! Donc attendez-vous à recevoir un courrier ou la visite d’un opérateur qui a identifié « une zone d’implantation potentielle » pour ses éoliennes et qui a l’agrément de la mairie (même si le maire n’a pas de pouvoir de décision à ce jour). Le préfet est le seul qui peut donner cette autorisation, à condition qu’il ait l’accord en amont du propriétaire puisqu’il s’agit d’un « projet privé sur un terrain privé ». Bref comme l’écrit le Particulier, si vous acceptez, le démarcheur commercial sortira le « grand jeu… sur votre rôle d’acteur incontournable de la reconversion énergétique ». Alors restez prudent… Quelques conseils distillés par Le Particulier :
Bref des personnes non averties signent sur un coin de table avec des promesses de mesures compensatoires : chemin bitumé, fourniture d’un véhicule électrique, ou intimidations comme témoigne Yves Melin du collectif Vosges Environnement Durable. Si vous refusez les éoliennes, « elles seront sur le terrain du voisin sans en avoir les avantages financiers ».
Les promoteurs d’éoliennes affirment que les propriétaires n’auront pas de perte en cas de revente de leur bien. Dans un article de Ouest France du 18 avril 2024, ils s’appuient sur une étude de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la Maitrise de l’Energie). Seul problème : l’ADEME n’a jamais confirmé et même pire l’agence a clairement indiqué que l'impact sur la valeur des biens immobiliers à proximité des éoliennes n'a pas été exploré.
Quinoa, vous connaissez ? ***
Oui Quinoa, non, ce ne sont pas les plantes herbacées, mais c’est le nom de ces nouvelles éoliennes. Elles mesurent 12 mètres et sont verticales, un projet est en cours à Guingamp. Le but serait une production décentralisée d’électricité pour les collectivités territoriales, les industriels et les exploitations agricoles. A puissance égale, elles demanderaient moins de foncier, mais elles seraient plus nombreuses. Ceci étant, ce sont toujours des éoliennes d’un autre type certes… Mais toujours aussi peu agréables pour nos paysages… A suivre…
Quels impacts ? Quel bilan ?
Pendant 10 ans, les associations d’Erquy, Plurien, Frehel, Pléneuf Val André, Lancieux, vous ont exposé toutes les raisons de s’y opposer : Pollution visuelle, les écosystèmes marins menacés par le bruit, les sédiments rejetés par les forages, l’aluminium dissout dans l’eau (64 tonnes par an pour Saint Brieuc), la consommation excessive de terres rares, la faiblesse des emplois créés, nous alertions déjà sur la question du démantèlement, la dévaluation des biens immobiliers… Nous parlions aussi de cette production d’énergie faible et irrégulière (pas de vent, trop de vent…) et « cerise sur le gâteau » : le surcoût d’installation répercuté au consommateur.
Aujourd’hui, au moment de cette explosion d’éoliennes industrielles, nous ne pouvons que constater les dégâts :
Lors de la manifestation du 19 octobre 2024, une demande d’audience face aux impacts avérés des projets de centrales éoliennes et solaires a été adressée à Monsieur le préfet des côtes d’Armor ****, sur les points suivants :
Un changement de cap est vital aujourd’hui
Cette audience a eu lieu le 12 décembre 2024. Les personnes présentes à ce rendez-vous ont demandé en conclusions :
Lundi 2 décembre, une tribune a été signée dans l’hebdomadaire Le Point par dix anciens ministres, parlementaires, anciens dirigeants d’entreprise (dont Henri Proglio, ancien président d’EDF) qui alertait sur « l’extrême gravité pour la France de poursuivre la politique énergétique proposée par le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie… et particulièrement la poursuite à marche forcée d’installations d’éoliennes marines ou terrestres et de panneaux solaires qui ne servent en aucun cas à la décarbonation de notre pays ».
9719 éoliennes décorent nos campagnes (dont 1302 en Bretagne en 2023)… Et l’Etat, tenu d’atteindre la neutralité carbone en 2050 (feuille de route du GIEC), prévoit d’en construire encore 19 000… Comment allons-nous circuler au milieu de toutes ces éoliennes ?
Pour finir… Un petit bonus… Le tourisme éolien…
Ouest France le 7 janvier 2024 nous relatait qu’en 2023, près de 5 000 passagers ont voulu voir les 62 éoliennes récemment installées. Merveilleux !!!
« Face à l’engouement constaté, nous avons décidé de tripler l’offre avec 35 dates proposées contre 10 l’an passé », détaille Anne-Lise Corlouër, la présidente de la société les vedettes de Bréhat.
Tout se voit, tout se visite, tout se vend… Sur ces vedettes touristiques, les passagers doivent écouter un laïus explicatif tout au long du circuit. Pensez-vous que les touristes soient bien informés des impacts économiques, financiers et environnementaux de ces éoliennes ?
*Journal Dis-leur. Votre dose d’informations en Occitanie Mars 2023
**Le Particulier N°405 mars 2023
*** Ouest France décembre 2024 Des éoliennes d’un nouveau genre
**** Audience demandée par Hubert Bouan, Président du Collectif de Sauvegarde du Pays breton et Damien Toneatti Président de l’Association Les Treize Vents